"Pour aller de Vigàta à Calapiano, toute personne de bon sens, dotée d'une connaissance même superficielle de l'état des voies publiques siciliennes, aurait d’abord pris la voie rapide pour Catagne, puis aurait emprunté la route qui s'enfonçait à l'intérieur des terres vers les 1120 mètres de Troina, pour descendre ensuite aux 651 mètres de Gagliano, par une espèce de chemin qui avait connu sa première et dernière couverture asphaltée cinquante ans auparavant, aux premiers temps de l'autonomie régionale, pour enfin rejoindre Calapiano en suivant une provinciale qui, manifestement, se refusait à être considérée comme telle, son aspiration authentique étant de reprendre l'aspect de la draille bouleversée par un tremblement de terre qu'elle avait été autrefois. Ce n'était pas fini. Le domaine agricole de la sœur de Mimi Augello et de son mari se trouvait à quatre kilomètres du village et on y arrivait en suivant un ruban sinueux de pierrailles qui suscitait même la perplexité des chèvres, s'il s'agissait d'y poser une seule des quatre pattes dont elles disposaient."
(Andrea Camilleri, La voix du violon, chapitre 9)